Premiers cris, premiers pas, premiers émois, … A partir de sa naissance, l’enfant se construit tout en découvrant les autres et le monde. Un premier article vous a déjà présenté les moments clés de l’évolution du jeune enfant, abordons maintenant les étapes franchies entre 3 et 6 ans.
Développement moteur : l’âge du jeu
Passée la maladresse qui caractérise la période précédente, l’enfant, entre 3 et 6 ans, développe une plus grande aisance dans ses mouvements. Il sait enfiler des perles, marcher sur la pointe des pieds : c’est le début de l' »âge de grâce ». Toute son activité motrice s’oriente alors vers le jeu, par lequel il prend la mesure de ses capacités et exprime son imaginaire. Vers 3 ans, l’imitation réciproque est le mode de communication privilégié entre enfants. En grandissant, ils jouent de plus en plus à faire semblant et investissent des rôles (le pompier, la maîtresse, le papa et la maman, …).
Dès 2 ans et demi, l’enfant a acquis les éléments essentiels de son schéma corporel : il sait où se trouvent son nez, ses épaules, ses genous. La latéralité se met en place (main gauche ou main droite) et l’enfant produit des dessins figuratifs : les premiers « bons-hommes-têtards » (à 3 ans) s’enrichissent de détails (nombril, cheveux vers 4 ans) puis acquièrent un tronc et des membres articulés (5 – 6 ans).
Développement intellectuel : la pensée égocentrique
Auparavant, la pensée de l’enfant ne pouvait utiliser que ce qui était immédiatement accessible à ses sens. Ce qu’il ne voyait pas, ne touchait pas, ne goûtait pas, … n’existait pas. Désormais, il peut imaginer un jouet qu’il n’a pas sous la main ou imiter un geste en l’absence de son auteur. C’est le début de la représentation symbolique.
Mais ses capacités d’abstraction restent limitées. L’enfant ne peut pas concevoir qu’une chose ait une existence indépendante ou différente de la sienne. Il croit, par exemple, que les cailloux ont des mamans ou que la voiture dort en même temps que lui. Sa pensée est égocentrique. Elle est également syncrétique : ses connaissances s’amalgament sans vraie hiérarchie, sans que les relations de causalité ou de chronologie soient toujours bien repérées ; elles mêlent le réel avec l’imaginaire (« hier, j’ai pris l’échelle de mon papa, je suis monté dans l’avion et puis c’était la nuit »).
Développement affectif : le complexe d’Oedipe
L’enfant fait son entrée dans le stade phallique. Ce qui, à présent, l’intéresse au plus haut point, c’est sa zone génitale. Il la chatouille, la montre, cherche à la comparer et fait à cette occasion une découverte capitale : le sexe des petites filles ne ressemble pas du tout au sexe des petits garçons. Les premières expriment parfois un très profond désarroi à l’idée d’avoir perdu leur zizi, tandis que les seconds reedoutent de voir le leur disparaître. C’est le « complexe de castraction » qui marque l’entrée dans la phase oedipienne (3-4 ans).
L’enfant se met alors à développer de l’hostilité envres le parent du même sexe et redouble de séduction envers le parent de sexe opposé, dans l’espoir souvent proclamé de pouvoir l’épouser. La résolution du complexe d’Oedipe intervient aux alentours de 6 ans, avec l’intériorisation des exigences et des interdits parentaux qui forment le Surmoi.
La pensée magique selon Piaget
Le pyschologue suisse Jean Piaget, grand théoricien de ma formation de l’intelligence (voir le billet plus complet intitulé « les stades de l’intelligences selon Piaget« ), a mis en évidence la pensée magique des enfants de 3 à 6 ans. Leur représentation du monde, explique-t-il, se caractérise par l’adualisme (la confusion entre le moi et le non-moi qui le laisse penser que les rêves viennent de la chambre où il dort), l’animisme (il croit que tous les corps sont vivants, que le caillou a peur qu’on le jette dans l’eau), la causalité morale (il pense que le soleil est gentil parce qu’il le réchauffe), le finalisme (il considère que tout a une fonction : « la nuit, c’est pour dormir ») et l’artificialisme (tout a été fabriqué, ce sont des gens qui ont construit les montagnes). Il croit en outre pouvoir changer le cours des choses par des pratiques magiques, par exemple réaliser un souhait en marchant sur des dalles sans toucher les interstices. Pas étonnant que le monde lui paraisse parfois si inquiétant !